Geoffroy Noel de Burlin, premier paraplégique à s’attaquer en solo à l’Africa Eco Race.``Je vis un rêve éveillé…``
Never give up ! Ce leitmotiv est celui de Geoffroy Noel de Burlin. Depuis quinze ans et cet accident de snowboard survenu à Val-Thorens, ce passionné de glisse et de sports mécaniques puise son énergie vitale dans le dépassement de soi.
Ce père de famille de deux enfants, qui fête aujourd’hui ses 40 printemps, s’apprête à vivre le challenge le plus important de sa vie. Seul à bord de son Polaris RZR RS1, un petit buggy monoplace entièrement préparé pour lui, notre compatriote est le premier paraplégique à s’attaquer en solo à l’Africa Eco Race. Un pari fou ? Non, simplement l’aboutissement d’une passion restée intacte et d’un défi vital qui nourrit sa motivation depuis plus de 15 ans…
Après deux jours de vérifications à Menton et le départ protocolaire en soirée sur le port de Monaco, la caravane de l’Africa Eco Race a embarqué ce matin à Savone (Italie) pour deux jours de traversée à destination du Maroc. De quoi laisser à tous les concurrents le temps de se familiariser avec les règles mises en place par l’organisation et de peaufiner les derniers détails de leur préparation.
Geoffroy, comment vous est venue cette idée un peu folle de vous embarquer dans une telle aventure ?
“J’ai toujours adoré le sport mécanique. A six ans, je roulais déjà sur la moto d’un ami, car mes parents refusaient que j’en ai une. Je me suis acheté ma première moto de trial à 13 ans, après avoir effectué des petits boulots. A 15 ans, je roulais en quad, comme pilote amateur…”
Vous rêviez de devenir un grand pilote ?
“Non, pas vraiment. J’étais juste fou de sports mécaniques, de glisse et d’adrénaline. Après mes études d’éducation physique, j’ai décidé de passer une saison en station de ski comme moniteur à Val-Thorens. En sautant une barre rocheuse, je me suis mal réceptionné. Je suis tombé la tête la première. Ce saut, je l’avais déjà fait une trentaine de fois ! J’ai dû être héliporté vers l’hôpital de Grenoble. En ne sentant plus mes jambes, j’ai très compris ce qui se passait…”
Où avez-vous puisé la force pour reprendre le contrôle de votre vie après un tel accident ?
“Pour moi les choses étaient relativement simples. Je devais réapprendre à vivre, mais assis. La première étape vers une liberté retrouvée était de pouvoir se transférer seul du sol à la chaise. Après trois mois, j’y suis parvenu et j’ai pu rentrer à la maison. Ensuite, pour la rééducation, je m’étais fixé un objectif : arriver à descendre seul une fort en pente en herbe, juste à l’entrée du centre de rééducation à Brugmann. Je savais que le jour où j’y arriverais, je n’aurais plus besoin d’y aller. J’ai du m’y reprendre à plusieurs fois, mais j’ai fini par y arriver…”
Est-il vrai que vous avez participé à votre première compétition de quad, seulement 10 mois après votre accident ?
“Oui, exactement, il s’agissait de l’Alpes Quad Trophy à Tignes ! Le quad m’a rendu ma liberté. J’étais autonome et j’ai décidé de commencer à voyager et d’en faire profiter les autres. J’ai créé X-Raids pour organiser des balades en quad. En Belgique, mais aussi un peu partout en Europe et au Maroc… C’est, finalement, ma rencontre en 2009 avec Thierry Gérome, ce pilote paraplégique bien connue dans les rallyes tout-terrains, qui m’a amené vers la compétition off-road. Avec l’arrivée du premier SSV Polaris, j’ai retrouvé une deuxième jeunesse ! Ce petit buggy effaçait complètement la différence existante entre les personnes valides et moi…”
“Rouler comme un mécano !”
Geoffroy promet de suivre le conseil de son pote Nicolas…
Qu’est-ce qui vous a décidé à vous inscrire sur l’Africa Eco Race 2020 ?
“En l’espace de dix ans, j’ai pris part à plusieurs courses, comme pilote ou comme copilote. J’ai pu emmagasiner pas mal d’expérience. Lorsque Polaris Benelux a annoncé la sortie du RZR RS1 monoplace, je me suis dit qu’il était pour moi ! L’Africa Eco Race, c’est le Dakar de mon enfance, celui dont j’ai toujours rêvé. J’ai pris part au Morroco Desert Challenge en solo et j’ai fini 8e. En fait j’aurais dû être 6e, mais le dernier jour, je me suis tellement fait plaisir avec un autre concurrent, que j’ai loupé plusieurs points de passage et écopé de pénalités. Je ne regrette rien car j’ai pris un plaisir fou !”
Comment abordez-vous une course comme l’Africa Eco Race ?
“Je n’ai jamais abordé une course pour ne pas la finir. Mais je sais aussi que je vais devoir être très prudent, pour arriver jusqu’au Lac Rose. Bien sûr, je vise le classement, mais je ne vous dirai pas quelle place j’ambitionne au général ! C’est évidemment une course qui se joue sur la longueur. Je veux juste être content de moi et qu’Arthur et Maxime, mes deux fils, soient fiers de leur papa ! Je connais déjà pas mal le Maroc, mais la Mauritanie sera une véritable découverte. C’est aussi là-bas que la course va se jouer. Donc je vais tâcher d’être très patient. Mon meilleur pote et préparateur, Nicolas Hoogsteyns, m’a appris à rouler comme un mécano. Il faut absolument préserver la mécanique, surtout sur ce type de rallye de longue haleine…”
Texte : “Philippe Jansens”
Source : Magazine “DH”
Source : http://www.dhnet.be